Avec son complexe sportif Cops, Alex Chouffe, ex-cycliste professionnel, mêle la préparation physique d’athlètes de haut niveau et l’entraînement à la petite semaine de sportifs amateurs. Autre innovation, le centre est étroitement lié à l’université et à la recherche en sciences du sport. Hybridation à tous les étages.
C’EST UN CENTRE TEL QUE VOUS N’EN AVEZ JAMAIS VU.
Cops, pour Complexe d’optimisation de la performance sportive, est installé à Besançon. Derrière cette dénomination discrète se cache une
ambition forte : faire cohabiter des sportifs de haut niveau et Monsieur Tout-le-Monde. Il suffit de se pencher sur le profil des deux cofondateurs pour cerner l’enjeu. Le premier, Alex Chouffe, est un ancien cycliste professionnel. Le second, Romain Bouzigon, est docteur en sciences du sport.
Pendant que le gérant nous explique le concept de Cops, près de lui, des athlètes s’entraînent pour les Jeux olympiques de Paris 2024. Et non loin, des sportifs lambda font leur séance hebdomadaire. Étendu sur 2 200 m2, le centre s’articule autour d’une offre de fitness (Besançon Fitness) et des entraînements pointus (« Inside the athletes 3.0 »). « Avec “ITA 3.0”, nous vous suivons dans la compétition, dans la reprise de l’activité sportive, dans la réathlétisation, la perte de poids ou encore l’entretien physique », explique le club qui s’appuie sur « de nombreuses collaborations universitaires et professionnelles », en particulier avec Frédéric Grappe, conseiller scientifique, maître de conférences, HDR, docteur en sciences de l’UPFR STAPS. Depuis peu, Cops est labellisé Maison Sport-Santé.
GRAND ÉCART
Pourquoi réunir professionnels et amateurs sous un même toit ? « Peu le savent, mais les sportifs de haut niveau sont, eux aussi, très fragiles. Ils ne doivent pas se couper de la réalité du terrain », assure Alex Chouffe. Hélas, il sait de quoi il parle. « En une seconde, je suis passé d’athlète professionnel à handicapé. J’ai arrêté ma carrière cycliste en 2003 lorsqu’une voiture m’a roulé dessus, je ne pouvais plus utiliser mes mains pendant un an et demi », témoigne-t-il. Un grand écart entre rêve et réalité qu’il « faut travailler toute sa carrière ». « Un athlète peut être trop souvent dans une bulle et lorsqu’il en sort, il peut mettre des années à se réidentifier à une vie normale », estime l’ancien champion. Après son accident, lui se reconvertit dans l’immobilier et le secteur événementiel. Et finalement, le fitness. En 2013, dans des locaux en copropriété, il crée Fitness Besançon. Son idée : « Trouver une solution pour les sportifs qui n’évoluent pas en équipe et sont mal encadrés. » L’ancien sportif de haut niveau veut leur proposer une perspective même s’ils sont lâchés par leur club ou leur fédération… ou par leur mental. Alex Chouffe qualifie son club de « centre de la seconde chance ».
Les athlètes suivent une préparation physique, en lien avec le coach ou le manager du sportif concerné. « Nous préparons la voiture de course puis nous la remettons au pilote » compare le manager. « On s’occupe du physique et du mental, pas de la tactique. » Les préparations sont planifiées à « J-3 mois ». Les athlètes peuvent accéder au club de 7 à 21 heures et « un coach sera toujours présent dans le club ».
Créer une structure pour les athlètes, c’est bien. Mais l’entrepreneur ne s’est pas arrêté là. Son idée a, tout de suite, été de se rapprocher du savoir universitaire avec le but de bâtir des programmes sur une base scientifique. C’est un peu comme ces start-up high- tech qui s’installent sur des campus. Des doctorants et des entrepreneurs évoluent côte à côte, les premiers sur la recherche, les seconds sur ses applications.
OXYGÉNATION HYPERBARE
Cops est en lien permanent avec l’université de Franche-Comté. Si Alex Chouffe est directeur de la structure, son comparse Romain Bouzigon, un spécialiste de la cryothérapie, chapeaute, lui, une écurie d’universitaires. Deux thésards, Thibault et Joris, qui mènent leurs thèses pour les JO de Paris 2024 : une sur la récupération par oxygénation hyperbare, et l‘autre sur l‘entraînement en altitude (hypoxie) couplé avec une méthode de récupération. Ils travaillent également avec trois étudiants en master 2, deux en master 1, puis cinq en licence 3 et enfin trois en licence 2. « Ils viennent chez nous pour valider leur stage, on leur donne des missions d’entraînement. Nous formons un groupe d’une quinzaine de personnes où chacun aide l’autre ce qui amène beaucoup de rapidité et de connaissance en peu de temps », explique le manager.
Le club fédère 14 coachs indépendants chargés de prendre en charge tous les clients, athlètes pour les thésards et Monsieur Tout-le-Monde pour les moins « diplômés ». Une précision : tous suivent la filière Staps.
Concernant le nombre de salariés, ils sont « quatre », indique Alex Chouffe, mais il ne partage pas le nombre d’adhérents, qui seraient « plusieurs centaines ». « Nous ne sommes pas dans la course aux clients, mais à la compétence, c’est un système complètement différent. Nous préférons avoir moins de monde, mais que ces personnes soient bien encadrées », assure le dirigeant.
Avec autant d’universitaires, Cops, propose une offre hyper pointue : cryothérapie corps entier, oxygénothérapie hyperbare, hypoxie training, thermotraining room… et même des appartements hypoxiques. Ce genre d’offre n’existe tout simplement pas ailleurs. Pour rappel, les chambres hypoxiques, aussi appelées chambres d’altitude, sont des pièces qui simulent l’altitude à des fins d’entraînement, de rééducation ou de recherche. Pour le reste, la partie consacrée à l’entraînement physique, Cops est entièrement équipé TechnoGym sur 500 mètres carrés. Mais combien ça coûte, tout ça ? « Un gros billet », sourit Alex Chouffe, qui préfère rester discret, car il a « tout financé sur fonds propres, sans aide ».
Une fois qu’on a dit ça, il faut imaginer que ce centre n’est pas une tour d’ivoire pour les athlètes olympiques… « Nous avons des personnes d‘un certain âge qui s’entraînent à côté d’un champion du monde, une personne en situation d’obésité à côté d’une star du handball, du BMX ou du karaté » met en avant Alex Chouffe. En fait, ils partagent un point commun : tous deux luttent, s’entraînent très dur et veulent être meilleurs qu’eux-mêmes la veille et l’avant-veille. « Ça a beaucoup de sens. Pour moi, c’est la priorité de demain. Nous savons que placer les athlètes dans des couloirs est néfaste pour leur carrière. Le partage a de nombreuses vertus, y compris entre sports différents », affirme l’ancien cycliste pro. « Moi, j’en étais arrivé à en avoir marre de voir toujours les mêmes personnes. Le fait de rencontrer des sportifs d’autres univers et même des amateurs amène un sens ludique et aide à donner du sens à sa pratique. »
« PROPAGANDE POLITIQUE »
Côté abonnement, la partie Besançon Fitness facture 29 euros par mois pour les étudiants, 39 euros pour un adulte engagé sur un an (et 49 sur un mois).Pour avoir accès au Bio Circuit (22 minutes de cardio et 30 minutes de musculation), le forfait passe à 49 euros par mois. Deuxième étage de la fusée : l’offre de coaching « ITA 3.0 » est à 65 euros mensuels. Pour ce prix, l’abonné bénéficie d’un programme d’entraînements personnalisés. Pour 95 euros par mois, enfin, il a accès à un suivi personnalisé et la mise en place de séances « COPS 25 » incluant du « hors salle ». Les cours collectifs, eux, incluent cuisses-abdos-fessiers, step, gym douce, cross training, body sculpt, yoga, Pilates, Garuda, aéro (danse rythmée) et du stretching.
Cops, c’est donc aussi un label Maison Sport-Santé. Cet agrément témoigne de la qualité de l’offre du centre. Mais en face, Alex Chouffe dénonce une « coquille vide » et une « propagande politique ». « 95 % de la population est en manque d’exercice physique or, si vous allez chez le médecin aujourd’hui, il ne vous prescrira jamais de faire plus de sport ou ne serait-ce que de marcher, mais il doublera les doses », dénonce-t-il. « Le label Maison Sport-Santé, on en a fait tout un plat, mais aujourd’hui, aucun médecin ne prescrit d’ordonnance pour faire du sport. Pourtant, les centres labellisés doivent être référencés, parce que nous avons eu des contrôles, mais en face, il y a un tel lobby pharmaceutique, qu’ils préfèrent prescrire des médicaments », poursuit-il.
« Là, nous sortons de deux ans de pandémie, et nous avons accentué les problèmes de dix à quinze ans en moins de deux ans, car beaucoup de gens sont devenus sédentaires. » Plutôt que d’attendre que ces adhérents en puissance tombent du ciel, envoyés par des médecins, Alex Chouffe mise sur les réseaux sociaux pour essayer de les mettre au sport. Mais en réalité, le plus efficace reste le bouche-à-oreille. « Les gens, lorsqu’ils sont contents de leur salle, ils font des contenus sur les réseaux, sur leur Instagram et TikTok, et ils vous font votre publicité. » Particularité chez Cops : les athlètes le font aussi !
Pour la suite, Alex Chouffe n’imagine pas changer de modèle et, par exemple, ouvrir une franchise. « Tout le monde peut ouvrir un Cops, mais encore faut-il mettre les compétences à l’intérieur », souligne-t-il. Très lié au monde universitaire et à la recherche, s’il devait créer d’autres centres, ce serait forcément près d’un campus. Mais ce n’est pas suffisant, selon lui. En étant installé à Besançon, Cops rayonne sur l’Allemagne, la Suisse et l’Italie. « Nous pouvons faire venir des équipes sportives de toute l’Europe, car nous sommes sur un axe stratégique. C’est un projet de territoire. »